16 avr. 2009

A propos des mères porteuses

Généthique rapporte :

Libération consacre un article à l'essai publié par la philosophe Sylviane Agacinski sur la "barbarie" des mères porteuses : Corps en miettes (Flammarion, 12 euros).
"On peut se demander si la leçon du nazisme a réellement été tirée tant l'opinion semble se soucier peu de ce que signifie notre humanité ou de l'esprit de nos lois. Elle privilégie la puissance technique et la demande individuelle. Certains techniques permettent de confectionner des enfants, et il y a des individus qui "demandent" à utiliser ces moyens. Le reste a-t-il vraiment de l'importance ?", écrit-elle.Elle dénonce par ailleurs l'usage du mot "gestatrice" qui "relève d'une ruse rhétorique qui contribue à secondariser la femme portant un enfant, pour faire un sac, une sorte de logement temporaire, simple entrepôt où stocker l'enfant conçu par d'autres qui en attendront la livraison". Idem pour l'abréviation "GPA" (pour "gestation pour autrui") : "trois petites lettres (...) sans doute rassurantes" mais qui "constituent une mystification et maquillent une forme inédite de servitude et d'abaissement des femmes".La philosophe s'élève contre l'exploitation du corps d'autrui au centre du "baby business", "l'aliénation biologique" qui "s'installe dans la procréation artificielle". "Devant l'indifférence à l'égard de ces femmes, dont on fait aujourd'hui des couveuses "indemnisées", on ne peut s'empêcher de reconnaître la froideur égoïste et le vieux mépris de classe de ceux qui estiment normal de mettre la vie des autres à leur service." Elle se demande enfin si le fait que les mères porteuses justifient leur "don" par générosité ou altruisme n'est pas "l'aspect le plus répugnant de l'affaire".
Par ailleurs, Le Parisien publiait, vendredi 10 avril dernier, un dossier sur les mères porteuses, au lendemain de l'appel lancé par 60 personnalités en faveur de la légalisation de cette pratique (cf. Synthèse de presse du 31/03/09) et alors que le sujet devrait être évoqué au cours de la révision de la loi de bioéthique. Secrétaire d'Etat à la Famille, Nadine Morano s'est de nouveau prononcée en faveur de la légalisation de cette pratique. En réponse à la position de Nadine Morano, Jean-Frédéric Poisson, député UMP des Yvelines et porte-parole du Forum des républicains sociaux (FRS), a déclaré que : "défendre les mères porteuses, c'est aller vers une société libertaire et utilitariste".
"C'est une chose de déclarer vouloir dépassionner le débat, c'en est une autre de traiter les questions de société à coup de bulldozer", a-t-il poursuivi.

1 commentaire:

Hélène a dit…

« Les glissements sémantiques intéressent aussi beaucoup Sylviane Agacinski. "On est passé des «mères porteuses», aux «mères de substitution», puis à la «maternité de substitution», à la «maternité pour autrui» avant d'atteindre la GPA (gestation pour autrui). Les mots sont ici le symptôme d'un malaise (...) L'idée d'utiliser un être vivant pour sa capacité «gestationnelle» n'avait d'ailleurs concerné jusqu'ici que les animaux d'élevage.»

Permettez-moi de m'esclaffer ! Un peu de rappel sémantique et historique. C’est la loi de 1994 qui introduit les termes de procréation pour autrui (la femme qui porte l’enfant d’autrui passe par une insémination de sperme, elle transmet donc aussi son patrimoine génétique) et la gestation pour autrui (la femme porte un embryon issu des gamètes des parents d’intention. Il n’y a donc pas de lien génétique entre cette femme et l’enfant). Ce sont donc deux situations bien différentes en matière de psychologie comme de physiologie. Ensuite, le Sénat en 2008 a étudié ces deux catégories d’arrangements reproductifs dans un rapport sous le titre de « Maternité pour autrui ». Le malaise que S. Agacinski est qu’elle ne s’est jamais penché sur ces questions et qu’elle reprend le terme utilisé lors des polémiques de la fin des années 80 : les mères porteuses. Ignorance crasse et manipulation, voilà la réalité. Par ailleurs, quelle différence dans le discours avec Mme Boutin ?

Ensuite, il me semble que les propos outranciers de Mme Agacinski sont un jugement des actes des couples infertiles truffé d'insultes les plus débiles. Comment peut-elle faire croire que des grandes démocraties comme l'Angleterre, les USA, le Canada, l'Australie qui ont passé des législations pour autoriser et encadrer la GPA seraient des pays où l'esclavage serait autorisé ??? Mais Mme Agacinski ne s'embête pas à rencontrer la réalité des personnes (couples infertiles, gestatrices, et surtout enfants nés par GPA) car Madame sait tout et s'appuie sur de grands penseurs. Regardons-y de plus près :


Elle cite Marx qui avait prédit l'avènement d'une société où les pauvres produiraient les enfants pour les couples riches. Comme les techniques d'assistance médicale à la procréation n'existaient pas même en rêve à l'époque du grand Karl, alors, de quoi parlait-il ? Ne serait-ce pas plutôt de l'adoption que certains parent de toutes les vertus au point de nier la liberté pour un individu de choisir la façon dont il entend bâtir sa famille ? Mme Agacinski va-t-elle vouloir aussi interdire l'adoption au nom de ses grandes convictions toutes personnelles ?

Il faut remarquer chez S. Agacinski une grande capacité à travestir et instrumentaliser la réalité. Dans un face à face avec le Pr Debré recueilli par le Figaro (http://www.lefigaro.fr/lefigaromagazine/2007/11/09/01006-20071109ARTFIG0…), elle se recommande de Maurice Godelier dans son livre Métamorphose de la parenté pour prétendre que les enfants d'une mère porteuse ont peur d'être vendu à leur tour. Bêtise ou mauvaise foi ? Maurice Godelier est un des premiers signataires de l'appel pour la légalisation de la GPA lancé par l'association CLARA dont il fait partie au sein du Comité d'experts. Et son livre nous dit une tout autre musique que les fariboles de Mme Agacinski. Il faut dire que cette philosophe de la faribole apocalyptique n'en est pas à son coup d'essai. Au lendemain de la branlée bien regrettable subie par son mari Lionel Jospin, elle nous avait pondu un livre pour expliquer à ces idiots de Français qu'ils avaient mal voté. Et rebelote avec les militants socialistes après le vote interne à la candidature aux présidentielles qui avait vu gagner haut la main S. Royal (vidéo saisissante au http://www.lepost.fr/article/2008/10/12/1286633_chronique-de-la-haine-extra-ordinaire-sylviane-agacinski-et-l-inquisition.html).

Au fait, à part faire la promotion de son bouquin, quelle peut-être la motivation de cette philosophe de la gauche réactionnaire ? Car on peut légitimement s'interroger sur ce qui la motive à jouer obsessionnellement les talibans de la procréation ? Un problème personnel qui renvoie à l'image de la mère ? Le fait qu'elle ait choisi de laisser en route son enfant pour vaquer à une nouvelle union avec L. Jospin ? C'est vrai, j'oubliais, dans la philosophie selon Mme Agacinski, on ne s'encombre pas de la réalité.